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Strongylognathus testaceus de Claviger

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claviger
(@claviger)
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Début du sujet
 

Bonjour !

 

Comme vous aurez pu le constater à la lecture du titre, ce blog aura pour sujet le suivi de ma fondation de Strongylognathus testaceus. L'espèce étant assez peu connue, je vous propose un petit aperçu du genre et de l'espèce en premier lieu.

 

Le genre Strongylognathus se compose de 25 espèces, toutes parasites de Tetramorium, réparties en Europe ainsi qu'en Asie tempérée. Selon AntMaps :

Trois d'entre elles, à savoir Strongylognathus huberi, Strongylognathus alpinus, et bien sûr notre chère Strongylognathus testaceus, se rencontrent en France.

Les Strongylognathus sont très semblables à leurs hôtes, c'est pourquoi il est difficile de les reconnaître au milieu d'une colonie de Tetramorium. Seules leurs mandibules lisses, fortement arrondies, et en forme de "sabre" les trahissent, comme leur nom l'indique (Strongylo = arrondi, gnathus = mâchoire).

Certaines espèces, comme alpinus et huberi, sont esclavagistes : la gyne hôte est tuée, et au fur et à mesure que les Tetramorium périront, les ouvrières esclavagistes feront des raids dans les colonies voisines afin d'y récupérer du couvain, qui donnera naissance à de fidèles esclaves.

Néanmoins, d'autres espèces, et notamment Strongylognathus testaceus, sont des inquilines. Autrement dit, la gyne s'introduit dans la colonie de Tetramorium, mais la gyne hôte est épargnée ; c'est ainsi que les deux espèces, parasite et hôte, se développeront parallèlement au sein de la même colonie. Les phéromones de la gyne parasite empêcheront néanmoins le développement de sexués chez les Tetramorium.

 

Des trois espèces françaises, Strongylognathus testaceus est la plus commune, ou plutôt la moins rare. Elle fut décrite en 1852 par Schenck, sous le nom d'Eciton testaceum, avant que le genre Strongylognathus ne soit décrit pour elle dès l'année suivante. Elle se distingue des deux autres espèces françaises par un vertex fortement concave. La couleur, sensée être plus claire, peut aussi servir à l'identification, mais ce n'est pas un critère fiable comme j'ai pu en faire les frais.

Ses préférences en terme d'hôtes se ciblent sur Tetramorium caespitum, Tetramorium impurum et Tetramorium alpestre.

Dans une colonie mature, les ouvrières parasites seront le plus souvent peu nombreuses, n'excédant généralement pas 1% de l'effectif total. Elles seraient capables, bien que rarement, d'organiser de petits raids afin de récupérer un peu de couvain de Tetramorium supplémentaire ; à ce titre, l'espèce est parfois qualifiée d'"esclavagiste dégénérée", bien qu'elle reste inquiline plutôt qu'esclavagiste.

Maintenant que le contexte est posé, passons à ma fondation !

 

22/09/2020

La lettre arriva hier, lundi 21 septembre. Elle contient quelques esclaves, ainsi qu'une gyne, identifiée comme Strongylognathus huberi en raison de sa couleur très sombre.

Le tube était particulièrement bien protégé. Après avoir débattu un petit moment avec l'embalage de papier bulle et de scotch, j'y accède enfin. Je déroule le papier aluminium qui l'entourait... Et je découvre la fondation.

La réserve d'eau a eu une fuite, rendant le tube très humide et crasseux. Heureusement, une seule pauvre esclave s'est noyée. Au travers de la saleté, on peut distinguer les Tetramorium affolées, certaines avec du couvain entre les mandibules. J'examine cette petite foule... Et je la vois, ou plutôt, je la devine à travers la crasse du tube.

La gyne parasite ! Elle est splendide ; de même taille que les ouvrières, on ne la reconnaît que par un thorax subtilement plus épais, une tête plus carrée, d'élégantes mandibules sabres, un vertex concave... Un vertex concave ?! Eh oui : erreur d'identification, c'est en réalité une Strongylognathus testaceus particulièrement sombre, et non pas huberi comme annoncé. Cela me convient parfaitement ; les mœurs inquilines de testaceus m'attirent plus que l'esclavagisme d'huberi.

La fondation a donc été déménagée dans un tube propre ; elle compte actuellement environ 35 esclaves, la gyne, et un petit couvain principalement composé de larves.

Je vais tenter de leur faire adopter une gyne de Tetramorium d'ici peu, afin de recréer les "conditions naturelles" ; je vous détaillerai le processus d'adoption à ce moment.

26/09/2020

Les Tetramorium sont arrivées hier !

Une des deux gynes reçues était affamée et avait perdu ouvrières et couvain durant le transport ; aussi malheureux que cela soit, elle était en état parfait pour être adoptée. Comme je vous le rappelle, je fais adopter cette gyne de Tetramorium à la fondation comportant la gyne de Strongylognathus, afin que celle-ci puisse disposer de conditions plus "naturelles" (et puis, il faut le dire, une pondeuse continuelle dans la fondation sera bien plus pratique et moins stressante qu'un prélèvement régulier d'esclaves dans une fondation extérieure).

J'ai utilisé une méthode assez connue, mais comme on lit tout et n'importe quoi à son sujet, je la détaille ci-dessous pour ceux que cela intéresserait.

 

Cette méthode permet d'introduire une gyne seule dans un groupe d'ouvrières ; en aucun cas elle ne doit servir à booster futilement une fondation !

Elle a pour but de faire prendre à la gyne l'odeur coloniale du groupe d'ouvrières. Elle présente de très grands risques, et la gyne introduite ou sa futur descendance pourront très bien se faire massacrer du jour au lendemain. Elle est notamment utilisée pour faire adopter directement des esclaves à une gyne parasite.

Il vous faut tout d'abord isoler la gyne dans un tube avec peu d'espace, et si possible bien lavé (il ne faut pas que l'odeur d'une fondation s'y trouve déjà). Cette gyne doit avoir au moins un peu "faim", au moins assez pour aller immédiatement manger de la nourriture qui lui est présentée.

Ensuite, une ouvrière sera plongée dans de l'eau sucrée, puis le tout mis au réfrigérateur pour environ une demi-heure. Ceci va avoir pour effet de ralentir son métabolisme jusqu'à pratiquement l'immobiliser.

Vient maintenant l'étape la plus critique. L'ouvrière, normalement immobile, est sortie de son bain et placée, encore mouillée, sur un morceau de papier aluminium, qui est introduit dans le tube de la gyne. Il vous faut alors bien observer les événements.

La gyne devrait alors se mettre à déguster l'eau sucrée en léchant longuement l'ouvrière ; or, cela suffira souvent à lui faire prendre l'odeur coloniale de ladite ouvrière.

Ensuite, après un temps indéfini (qui semble dépendre de l'espèce ?), l'ouvrière se "réveille". Si elle montre un comportement agressif envers la gyne, ou qu'elle la fuit : la manipulation a échoué, il faut recommencer.

Si elle se montre amicale avec la gyne, ou même qu'elle l'ignore complètement : c'est en bonne voie. Faites alors rentrer quelques autres ouvrières dans le tube, puis observez bien si celles-ci sont toujours "amicales" à l'adresse de la gyne.

Si tout le monde s'entend toujours bien après un petit moment, vous pouvez alors réunir toutes les ouvrières et la gyne. Encore une fois, surveillez bien leur comportement, et soyez prêt à intervenir en cas de problème.

Si la gyne reste parmi les ouvrières après 24h, et est totalement acceptée : bravo, vous avez réussi l'adoption !

Néanmoins, tout n'est pas encore gagné, et loin de là. Que ce soit dans quelques jours comme dans quelques mois, les ouvrières peuvent très bien soudainement se "rebeller" et exécuter la gyne... Il ne faut jamais oublier les risques d'une telle méthode. 

 

Le protocole a été exécuté avec succès pour la gyne de Tetramorium, jusqu'au moment de la libérer à l'entrée du tube contenant la gyne de Strongylognathus et ses esclaves.

Elle y est timidement rentrée, mais s'est rapidement trouvée entourée d'ouvrières. Celles-ci se montraient très agressives envers elle, mais ne semblaient pas "oser" l'atttaquer. Cette situation a duré un petit moment.

Et puis, soudain... Elles se sont dispersées, laissant la grosse gyne tranquille et poursuivant leurs activités normales. Cette grosse masse stationnant au milieu du tube leur semblait désormais parfaitement invisible.

(toutes mes excuses pour l'atroce qualité de cette photo, prise au téléphone alors qu'il n'y avait que très peu de luminosité...)

De son côté, la grosse gyne restait tétanisée. Elle agitait frénétiquement ses antennes, peu habituée aux odeurs de cette fondation.

 

Ce matin, la gyne est au milieu des ouvrières, parfaitement acceptée à première vue.

Je n'ai pas assez expérimenté les adoptions de gynes pour savoir si ce comportement est normal ou non, mais je ne m'explique toujours pas le soudain désintérêt des ouvrières pour la gyne hier. Je me demande si la gyne de Strongylognathus, tapie au fond du tube, n'aurait pas eu une quelconque influence indirecte sur la scène par ses phéromones...

 

En parlant de la parasite, j'ai pu observer un comportement intéressant : sitôt qu'une ouvrières s'intéresse à elle, elle s'immobilise complètement. L'ouvrière se met alors à s'en "occuper", comme s'il s'agissait d'une grosse larve ou d'une nymphe.

Depuis que j'ai introduit la gyne de Tetramorium dans la fondation, l'inquiline se trouve souvent à côté de celle-ci, bien que je n'ai pas pu voir d'interaction directe entre les deux.

 

Et voilà, ce billet est enfin fini, merci de m'avoir lu !

Quelques petites photos de la gyne parasite pour terminer :




17/10/2020

Bonjour !

Un billet plutôt concis, pour vous dire que tout va bien. Merci de m'excuser pour la très mauvaise qualité des macros, prises à la va-vite alors que les ouvrières paniquaient.

Tout d'abord, la principale bonne nouvelle : les premières ouvrières sont là ! Le couvain était plus avancé que je ne le pensais, et ce sont depuis fin septembre trois ouvrières aux mandibules sabres qui se tournent les pouces au milieu de leurs dévouées hôtes Tetramorium. Même deux semaines après leur émergence, elles gardent une magnifique teinte jaune claire.



Un petit couvain est toujours présent, et j'ai pu apercevoir pendant la séance photo une petite grappe d'œufs ; reste à savoir qui l'a pondu. Je commence aujourd'hui une lente descente des températures, en visant une entrée en diapause vers mi-novembre.

Du point de vue de leur comportement, la gyne parasite ne s'éloigne jamais de son hôte. Ses ouvrières s'intègrent parmi les Tetramorium, mais sans surprise, ne participent pas aux tâches de la colonie, et ne constituent donc pour celle-ci que des bouches à nourrir supplémentaire.

Bref, cette petite fondation semble tenir la route pour le moment, espérons que cela dure !



Le [Q/R] du blog : https://antariums.com/blog-d-elevage/question-reponse/q-r-strongylognathus-testaceus-de-claviger/#post-53

Ce message a été modifié Il y a 4 ans 2 fois par One Ants
 
Posté : 18/10/2020 10:09 pm
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