Camponotus ligniperda

Europe

1) CLASSIFICATION ET SIGNIFICATION :

FAMILLE : Formicidae

SOUS FAMILLE : Formicinae

TRIBU : Camponotini

GENRE : Camponotus

SOUS-GENRE : Camponotus

ESPÈCE : Camponotus ligniperda

TAXONOMISTE ET ANNÉE DE DESCRIPTION : Pierre-André Latreille en 1802.

NOMS VERNACULAIRESCamponotus ligniperda, ainsi que C. vagus et C. herculeanus, sont appelées « fourmis charpentières ».

SYNONYMES ET ANCIENS NOMS UTILISÉSFormica ligniperda (ancien nom).

On rencontre parfois l’orthographe Camponotus ligniperdus, considérant erronément le nom d’espèce comme un adjectif devant être accordé au masculin du genre Camponotus. En réalité, « ligniperda » est actuellement considéré comme un nom en apposition, invariable quel que soit le genre, d’où l’orthographe correcte Camponotus ligniperda.

Étymologie genre : “Campo” est une racine du grec “kampé”, signifiant “courbé” et « notus » du grec ancien « νῶτος » signifiant « dos », soit « dos courbé » en référence au mesosoma arqué que présentent la plupart des espèces du genre.

Étymologie espèce : « ligniperda » est composé de deux racines latines « Lignum » signifiant bois et « perdo », signifiant « ruiner/gâcher/détruire ». Ce nom fait référence aux bois de charpentes et aux meubles dans lesquels elle apprécie nidifier s’ils ne sont pas traités.

2) MORPHOLOGIE ET IDENTIFICATION :

TAILLE GYNE : 14,5-16,5 MM

One Ants

TAILLE OUVRIÈRES : 7,1-14,5 MM
(toutes sous-castes comprises)

GOGOtier#7113 (via Discord)

MAJORS :

Triturus

TAILLE MÂLES : 8,5-11 MM

Philipp Hoenle

MORPHISME : Cette espèce est fortement polymorphe, avec des individus parfois 2 fois plus gros que d’autres au sein d’une même colonie. Le polymorphisme est continu, et l’on observe donc tous les intermédiaires de taille entre les plus petits minors et les plus imposants majors.

IDENTIFICATION : Dans la plupart des cas, Camponotus ligniperda et l’espèce voisine Camponotus herculeanus peuvent aisément être distinguées des autres représentantes européennes du genre par leur grande taille combinée avec un corps relativement trapu et partiellement rouge.
C. ligniperda et C. herculeanus peuvent souvent être différenciées par leur coloration. En effet, le mesosoma de la première est habituellement rouge vif, avec une grande partie du premier tergite arborant la même couleur ; chez la seconde, le mesosoma est généralement lie de vin, et le premier tergite est entièrement noir ou seulement subtilement entaché de rougeâtre. Cependant, ce critère ne permet pas une séparation parfaite des deux espèces, qui ne peut parfois être assurée que par la morphométrie.
A noter que, dans de rares cas, on peut observer des hybrides entre C. ligniperda et C. herculeanus, présentant des caractères intermédiaires entre les deux espèces.

DESCRIPTION : Camponotus ligniperda est une très grande espèce de Camponotus européenne de couleur noir brillant, à l’avant du gastre et au thorax rouge. Elle possède 3 sous-castes d’ouvrières (major, média, minor) ; le polymorphisme étant continu, les limites entre elles relèvent cependant du subjectif. Les majors sont très imposants, mesurant presque la taille de la gyne et possédant de très puissantes mandibules. D’après les observations, les médias serviraient principalement de « pots de miel » et s’occuperaient de déplacer le couvain. La pilosité peut être abondante.

PARTICULARITÉS PHYSIQUES NOTABLES : Camponotus ligniperda est la seconde plus grande espèce d’Europe, juste derrière Camponotus sanctus en Grèce. Elle est également la plus grande espèce de France métropolitaine avec sa cousine C. herculeanus. Les majors sont gargantuesques comparés aux autres espèces de la faune européenne. Les gynes peuvent parfois avoir d’énormes physogastries leur faisant atteindre 24 mm, principalement en période de gestation pré-fondatrice.

3) BIOLOGIE :

DESCRIPTION DU BIOTOPE : Camponotus ligniperda est une espèce typique des zones naturelles des climats tempérés et montagnards. Son biotope le plus fréquent est la lisière de forêt, si possible à flanc de montagne ou de colline. En Europe du sud sa répartition est limitée à la haute montagne sous les forêts de conifères, ou plus occasionnellement de feuillus. En altitude on l’observe jusqu’à 2 400 mètres (selon les observations de nos membres dans le Vercors et en Haute Savoie). Cette espèce affectionne les milieux boisés légèrement rocailleux, propices à son développement.

One Ants

One Ants

NIDIFICATION :  Les nids sont parfois dans les troncs d’arbres en décomposition au sol, secs ou humides, cependant beaucoup sont creusés à même le sol. En montagne, on observe Camponotus ligniperda également sous les pierres exposées au soleil. Cette espèce est polydome : chaque colonie est susceptible d’occuper de multiples nids satellites disséminés sur un assez large territoire. 

Philipp Hoenle

DÉMOGRAPHIE : 10 000 individus, bien que ce genre de colonies ne soit que très rarement observé.

PARTICULARITÉS COMPORTEMENTALES : Bien que les petites colonies se fassent très discrètes, cette espèce est très dominante dans son milieu. Les grosses colonies exercent une forte pression et sont très agressives, rivalisant avec les Formica sstr. et Manica rubida. Elles sont capables de se défendre en déposant des gouttes d’acide formique sur leur proie/agresseur. Chez cette espèce, on observe un nombre important de rapports trophiques (trophallaxies). Les travailleurs peuvent être observés très loin de leur nid. En journée, le fourragement est essentiellement solitaire, et s’effectue aussi bien au sol que dans les arbres. La nuit, de discrètes colonnes de fourragement se forment et relient les entrées du nid aux sources de nourriture.

ALIMENTATION : Dans la nature cette espèce se nourrit principalement de miellat et de nectar provenant des pucerons qu’elle élève et des plantes présentes dans son écosystème. Cette espèce est également frugivore, charognarde et se nourrira donc d’insectes ou plus rarement de viande. C’est donc une espèce omnivore et plutôt opportuniste, bien qu’en captivité certaines colonies puissent devenir difficiles avec le temps.

ESSAIMAGE : Les essaimages se font de mai à juillet, bien qu’en haute montagne des essaimages jusqu’à fin août puissent être observés.

Hannes Oberreiter

GYNIE : Cette espèce est strictement monogyne et ne pratique ni l’oligogynie, ni la pléométrose.

FONDATION : La fondation est indépendante et claustrale. La gyne ne sort pas de sa loge et nourrit ses larves avec ses réserves jusqu’à l’arrivée des premières ouvrières.

CYCLE DE DÉVELOPPEMENT : Le cycle de Camponotus ligniperda est endogène hétérodynamique, la diapause est déclenchée par l’horloge biologique de l’animal indépendamment des conditions extérieures.

4) RÉPARTITION :

Camponotus ligniperda est une espèce répartie dans toute l’Europe, sauf dans les Îles Britanniques.

Antarea :

5) ÉLEVAGE :

TEMPÉRATURE DE MAINTIEN : 19 à 25 °C. cette espèce est thermophile, la température influencera le temps de développement du couvain. D’environ un mois pour une ouvrière minor à la température idéale, il pourra aller jusqu’à deux mois pour les majors.

SET UP : En élevage, on privilégiera le tube (18mm ou 20mm) pour la fondation, puis la majorité des éleveurs proposera un nid en béton cellulaire ou en ciment. Cependant, certains ont choisi avec succès d’autres options plus naturelles : des nids en liège ou en bois (ce qui n’exclut pas une humidification régulière et essentielle) ou le terrarium.

HYGROMÉTRIE : 20 à 50 %. La nymphose se fait dans un cocon, les nymphes nues sont un signe d’hygrométrie trop importante, ils donneront généralement des imagos handicapés ou ne donneront rien et seront mis au dépotoir.

DIAPAUSE : Chez Camponotus ligniperda les larves hivernent avec la colonie. Elles stoppent leur croissance au deuxième ou au troisième stade larvaire et prennent une coloration jaunâtre due à une augmentation du taux de glycérol dans leur hémolymphe pour mieux résister au froid. Tous ces paramètres sont des signes qu’une vernalisation (période de mise au froid) est sur le point de commencer.

La diapause est longue et rigoureuse. Naturellement les colonies et gynes seules se mettront en pré-diapause en début septembre. La diapause commencera en octobre et se terminera en avril. Sa durée peut légèrement varier en fonction des provenances des gynes mais elle dure généralement 6 mois. Cette dynamique est cruciale pour la survie de la colonie, une absence d’exposition aux températures fraîches la dérèglera complètement, pouvant entraîner son déclin, voire sa mort à moyen terme.

ALIMENTATION EN ÉLEVAGE : Elles sont omnivores et opportunistes. En élevage, on nourrira cette espèce avec du pseudo-miellat (en variant régulièrement les recettes à base de miel, de lait, de sucre roux ou tout autre mélange), de quelques fruits BIO, d’insectes vivants (adapter les proies à la colonie), fraîchement tués ou congelés ou bouts de viandes crues.

FOREUSE ? : Oui, si la colonie manque de place, elles se mettront à creuser.

FONDATION : Il faudra placer la gyne dans un tube à essai préparé pour la fondation. La première génération compte généralement cinq ou six ouvrières. Comme pour beaucoup de Camponotus françaises, la fondation est longue et difficile. Il faudra maintenir la gyne dans le plus grand calme à l’abri de la lumière et des vibrations. Dès l’arrivée des ouvrières, ajoutez une ADC et nourrissez régulièrement avec des liquides sucrés.

Tomate#6158 (via Discord)

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DIFFICULTÉ D’ÉLEVAGE : Cette espèce requiert deux qualités importantes : la rigueur et la patience. De ce fait, elle ne sera conseillée qu’aux éleveurs persévérants souhaitant se lancer dans des fourmis aux conditions plus rigoureuses. Sa longue diapause et son développement extrêmement lent les premières années sont deux facteurs à prendre en compte pour les éleveurs souhaitant élever Camponotus ligniperda.

Sources et crédits :

Photographie de couverture : myrmicants.

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